Temple du pâté. Il n’aurait pas fallu qu’un astéroïde s’écrase sur le bâtiment de la Sucrière, ou se tenait, lundi 1er décembre à Lyon, la seizième édition du Championnat du monde de pâté-croûte. Dans cet ancien bâtiment industriel pour l’occasion dévolu à la plus célèbre des charcuteries pâtissières, était rassemblée la fine fleur de la gastronomie. Chefs très étoilés, dont une belle majorité de MOF, y cotoyaient critiques gastronomiques et autres vignerons reconnus.

 

Délégation helvétique. Côté Suisse, Michel Roth, chef exécutif de l'Hôtel Président Wilson à Genève, Danny Khezzar, à la tête du Bayview (18/20) dans le même établissement, et Fabien Pairon, chef de l’Auberge communale du Mont-sur-Lausanne (14/20) et organisateur de la sélection Suisse Allemagne Liechtenstein du concours, faisaient partie des membres du jury chargé de départager les seize candidats en lice lors ce cette compétition de haut-vol. Un jury d’exception présidé par le chef de l’Hôtel de Ville de Crissier, Franck Giovannini (19/20).


 

Thibault Gonzales Champion Monde Pâté Croûte 2025

Thibault Gonzales cumule les deux titres de Champion du monde pâté-croûte 2025 et de Prix de la Confrérie.

Emeline Aubry championnat du Monde de Pâté Croûte

Seule femme de cette finale, la Française Emeline Aubry remporte le Prix Richelieu, qui récompense le savoir-faire et la tradition française, avec un pâté au boudin noir.

Que la Force soit avec eux. Dans une ambiance survoltée, où chaque pâté entrait en scène sur l'air de Star Wars, les membres du jury, divisés en binômes, avaient dix minutes pour déguster chaque création. Idem pour les membres de la Confrérie du Pâté-Croûte, pros des métiers de bouche ou peoples amateurs de bonne chère tels que Mercotte ou encore le judoka David Douillet. Chef étoilés ou épicuriens avisés... La star du jour, même dégustée jusqu'à plus soif (et plus faim) n'a semblé lasser personne. Il faut dire que depuis quelques années, la charcuterie pâtissière connaît un regain de popularité. Et ce bien au-delà des frontières de la France, sa patrie d'origine. Pour preuve le niveau des candidats venus de contrées aussi lointaines que le Canada, les Amériques ou l'Asie.

 

Cap au sud-ouest. Longtemps délaissé, pointé du doigt pour sa production perçue comme plus industrielle qu'artisanale, le pâté-croûte incarne aujourd'hui la gourmandise, la technique, la convivialité et un retour au plaisir simple. Tout ce qui plait en ces temps agités. Remporté à quatre reprises, sur les cinq dernières éditions, par les Japonais, le Championnat du monde de pâté croûte est le graal des apprentis croûtistes. Cette année, à la partition millimétrée nippone, les juges ont préféré un pâté d'esthète certes, mais élaborés à base d'ingrédients qui fleurent bon le sud-ouest, porc, canard et magret. Comme un retour au terroir et à un soupçon supplémentaire de rusticité. Quant au candidat Japonais, c'est, entre autres qualités, le côté rigolo de son insert cochon qui lui a valu sa médaille de bronze.

Pâté Croûte Champion du Monde 2025 Thibault Gonzales

Le pâté-croûte façon vannier au porc Kintoa, canard fermier, poitrine de porc basque, magret et foie gras de canard des Landes et ris de veau, est l'oeuvre de Thibault Gonzales, champion du monde 2025.

Championnat du monde de Pâté Croûte 2 Jonathan Dudek

Le pâté «On a poussé mémé dans le rôti»: poitrine de cochon, filet de poulet jaune, garniture grand-mère, foie gras et peau de poulet rôti, par Jonathan Dudek, champion de France 2025.

Championnat du Monde de pâté croûte 2025 3 Seigo Ishimoto

La troisième place revient au Japonais Seigo Ishimoto avec son «Pâté-croûte du chasseur» plutôt expressif qui mélange gorge de porc, marcassin, venaison, foie gras et colvert. L'an dernier, il  avait été classé deuxième.

La pâté aux Japonais. Le Lausannois Xavier Bats, vainqueur en juin de la sélection suisse, n’a cette fois pas remporté la mise. Et c’est un Français, Thibault Gonzales, qui a ramené la coupe dans son pays d’origine. Non content de se hisser sur la première marche du podium, devant son compatriote le champion de France 2025 Jonathan Dudek, le Catalan installé à Thuir près de Perpignan a également remporté le Prix de la Confrérie du pâté-croûte. Un doublé encore inédit dans l’histoire de la compétition. Une preuve supplémentaire que la tradition a du bon.

 

Hommage au pays basque. Il faut dire que son paté-croûte tressé façon vannier, porc Kintoa et canard fermier avait des arguments plutôt convaincants. Parfaitement maîtrisée, sa farce gourmande à base de poitrine de porc basque, de magret, foie gras de canard des Landes et ris de veau affichait un bel équilibre de saveurs et de textures. Quant à sa pâte, savamment tressée comme de l’osier, et croquante à souhait, elle témoignait d’une cuisson parfaite. 

 

Fabien Pairon Danny Khezzar

Fabien Pairon et Danny Khezzar officiaient en duo lors de la dégustation.

Franck Giovannini Championnat Monde Pâté croûte

Franck Giovannini et Christophe Marguin, co-organisateur et animateur de cette finale.

Aussi beau que bon. Agé de 42 ans, l’ancien producteur de porc devenu as de la charcuterie a donc mis d'accord un jury rompu à l’exercice, toujours attentif au moindre élément qui pourrait faire baisser la note, comme une pâte mal cuite, une gelée pas assez présente ou une farce déséquilibrée en saveurs et en composition. En pleine dégustation, Joseph Viola, célèbre cuisinier lyonnais et Champion du monde de pâté croûte en 2009 avec Florian Oriol, levait les yeux derrière ses lunettes bleues pour confier: «Il y a vraiment un joli niveau, mais trouver un pâté croûte qui réunit la beauté et le goût  devient un peu plus compliqué».

 

Tranche élégante. Une perfection que Danny Khezzar et Fabien Pairon, assis côte à côte pour juger les seize pâtés, n’avaient pas encore repérée à la moitié de la compétition: «On a tous les deux eu un coup de coeur sur une pâte, une farce et une gelée, mais dans trois pâtés différents.» Mais il n'ont pas du attendre beaucoup, car c’est avec le neuvième candidat, Thibault Gonzales, que l'émotion et l’effet «waouh» attendus par le remuant membre du jury et journaliste gastronomique Vincent Ferniot, sont arrivées.

 

Parfaite harmonie. Une victoire imparable pour Fabien Pairon: «C’est vraiment celui qui a fait tilt. Le pâté, la croûte, la gelée, tout était en parfaite harmonie, il n’y avait rien en deçà, de l'esthétique extérieure du pâté à l’élégance du visuel, avec ces inserts de gouttes de foie gras et de champignons, jusqu'à l’harmonie de la farce. C’était savoureux, bien proportionné, un travail de fou qui cache des heures et des heures de réflexion et de travail!» Un vrai pâté champion du monde!

 

Championnat du monde de pâté-croûte

Photos: Championnat du Monde de pâté-croûte, Jennifer Segui