Propos recueillis par Knut Schwander | Photos: Adrian Ehrbar, Didier Martenet / L'illustré, Hôtel Beau-Rivage

IL REPREND UN LIEU HISTORIQUE! L’allure sportive et la veste élégante dont le bleu répond à celui de ses yeux vifs, Dominique Gauthier (en grande photo ci-dessus) ne fait pas son âge: à 56 ans, le chef de l’emblématique Chat Botté (18/20) et directeur culinaire du Beau-Rivage, à Genève, s’apprête samedi 2 septembre à vivre ici son dernier service. Le projet de ce jeune et entreprenant grand-père: un nouveau restaurant, dont il nous a confié le nom en primeur.
(Grande photo ci-dessus: Dominique Gauthier avec des fleurs de courgette, l'un de se ingrédients favoris)

 

Pour votre dernière semaine au Chat Botté, vous avez élaboré un menu spécial…

Oui, ce menu est intitulé «Les grands classiques du Chef Dominique Gauthier» et il recèle les plats que nos clients demandent et redemandent depuis des années. Ce sont des apprêts que je n’ai jamais pu ôter de la carte: la langoustine en kadaïf, le homard aux cèpes, la volaille à la truffe et le dessert à la Chartreuse y figurent. Leur succès me touche et me rappelle que la direction de Beau-Rivage m’a fait confiance et continue à se montrer bienveillante jusqu’au bout.

Alors, pourquoi partir?

Ici, à Beau-Rivage, le rythme est très soutenu, même si je ne suis évidemment pas là sept jours sur sept. Or, ma famille m’a incité à faire attention à ma santé. J’ai bientôt 57 ans… J’ai donc réfléchi, pendant plus d’un an, pour prendre une décision. A présent elle est prise et je me réjouis de donner une nouvelle tournure à ma carrière.

 

Une carrière de consultant?

J’ai envisagé cette possibilité. Mais ce n’est pas moi. Je ne veux pas renoncer à la cuisine. En tant que directeur culinaire, j’ai d’ailleurs toujours tenu à passer du temps aux fourneaux. Car c’est ça ma vie, ma passion. Comme je fais toujours les choses à fond, c’était trop. Et puis, il y a six mois, je suis aussi devenu papi du petit Nolan…

 

Donc vous partez en retraite?

Alors ça, quand même pas! Je vais m’accorder plus de temps et en consacrer plus à mes proches. Mais pour la retraite, ce serait vraiment très tôt! Non, je vais me consacrer à un nouveau restaurant…

Dominique Gauthier Beau-Rivage Genève langoustines en Kadaïf

Les langoustines en kadaïf, l'un des plats phares du chef Dominique Gauthier.

Dominique Gauthier Beau-Rivage Genève grenouilles de Vallorbe

Les grenouilles de Vallorbe, au dressage sobre et épuré.

Vous nous mettez l’eau à la bouche: de quel restaurant s’agit-il et où est-il?

Il se trouve à Genève, au 49 Rue du Rhône. Il s’agit d’un établissement historique, au décor classé, qui date de 1912, mais qui est fermé depuis le Covid. Il a porté plusieurs noms: la Bavaria, puis le Relais de l’Entrecôte et enfin la Marjolaine dirigée par Philippe Chevrier. L’ouverture du nouveau restaurant est prévue après les travaux, en novembre.

 

Et le nom du restaurant est déjà connu?

Oui, il se nommera «F-P Journe - Le Restaurant». En fait, j’ai été approché par François-Paul Journe, cet artiste-horloger qui est aussi un épicurien et qui adore autant la bonne nourriture qu’il est féru de vins fins. Son projet est de créer à cet endroit un restaurant qui relie horlogerie et gastronomie, avec nos passions conjuguées: mes plats dans les assiettes et ses dessins contre les murs.

 

Et que proposerez-vous dans ce nouvel écrin?

Je ne vais pas changer ma cuisine! Je tiens à garder ma signature et mon identité, dans le cadre d’une brasserie élégante. On y retrouvera certains plats emblématiques dans une petite carte, mais aussi un menu du jour à midi et un menu dégustation plus festif en soirée. Donc je vais me concentrer sur les produits et les saveurs, tout en cherchant à rester accessible.

 Marjolaine Genève 49 rue du Rhône

En février 2018, la Marjolaine était encore gérée par la société de Philippe Chevrier.

Et vous pensez vraiment arriver à vous reposer?

Il s’agira d’un restaurant de ville, qui vivra au rythme de la ville, mais sans banquets, ni room service. Ce qui nous permettra, à moi comme à mes collaborateurs, d’avoir des jours de repos. Ce sera aussi plus intimiste, avec un caractère plus spontané, moins contraignant. De plus, en salle, je vais retrouver un ancien camarade: Pascal Brault, avec qui j’ai travaillé pendant 30 ans!

 

Et au Chat Botté, qui reprendra les fourneaux?

Comme vous l’aviez annoncé, il s’agit de Mathieu Croze, formé chez Anne-Sophie Pic et chez Cyril Lignac. Il est à mes côtés depuis quatre ans. Il fait partie de ces jeunes cuisiniers que j’ai eu la chance de côtoyer et qui, sans bousculer le Chat Botté, saura lui apporter un souffle nouveau. Sa première carte est annoncée pour le 12 septembre. Et je suis confiant: ce sera une réussite.