Rico’s

Il a du charme, il est espiègle et il s’habille souvent comme un oiseau de paradis. Il ne s’énerve que rarement et il aime rire. A 60 ans, Rico Zandonella reste infatigable, malgré quarante-cinq ans passés en cuisine, dont dix comme patron de l’ancienne Petermann’s Kunststuben. Le joyeux Tessinois a fait ses preuves, comme chef et comme homme d’affaires avisé. Sur la Goldküste zurichoise, Zandonella est le traiteur des grosses fortunes qui l’adorent, lui et sa merveilleuse cuisine.
On commence par un bille presque transparente de queue de bœuf en gelée. Une bombe aromatique! Une praline de crevettes, un tartare de filet de bœuf aux canneberges et au raifort, un parfait cube de foie gras avec une gelée de fruits de la passion et de citronnelle. Quatre entrées en matière qui sont autant de cartes de visite d’un chef de grand talent. Le premier plat porte la trace de la biographie de Zandonella: Horst Petermann a un jour montré au jeune Rico, pendant son apprentissage de cuisinier, ce qu’est un foie d’oie parfait, comment le faire frire pour en faire un exquis délice. Et Zandonella n’a jamais oublié la leçon, au point de renouveler son interprétation avec un regard tout en modernité gourmande. Ainsi le sert-il sur une pêche épicée: la mise en scène est merveilleuse, les arômes étourdissants. Alors on poursuit avec deux plats de fruits de mer. D’abord une salade de fenouil, qui ressemble agréablement à une salade de homard, en version grand luxe avec du homard bleu de Bretagne et des calamaretti frais et finement coupés. Puis le turbot est impeccablement grillé, ce qui va de soi en ces lieux. Mais sa mise en scène est épatante, puisqu’il arrive baigné d’un jus d’orange et doucement cuisiné aux épices, avec des carottes quasi magiques, du curry, du gingembre et de la coriandre, une touche de lavande, de poivre rose, de salsa verde et de cannelle. «Mélangez bien le tout», recommande le chef. Et ça fonctionne!
Zandonella est aussi passé maître dans l’art de magnifier les pâtes, le risotto et l’œuf onsen. Ainsi son risotto verde, avec pétoncles, cerfeuil, basilic, persil italien, pignons rôtis et une espuma de homard raffinée. Ou cet œuf onsen qui garnit une merveilleuse polenta tessinoise, assorti d’un petit cube de poularde Alpstein. Et il y a la sauce! Une réduction de truffe du Périgord idéalement classique. Le plat principal était très «instagrammable»: un médaillon de cerf autrichien parfaitement cuit sur des petits pois, des haricots du Kenya et des pommes de terre nouvelles, le tout nappé d’une forte sauce au poivre et à la goyave. Une fois encore, c’est une fête pour l’œil comme pour le palais. Et en dessert, un baba à la fraise, à la noix de coco et au citron vert. Un délice, qui sied merveilleusement au jardin romantique et tranquille de ce restaurant d’exception.