Magdalena
Un couteau à steak géant de Victorinox, mais pas de steak. Par contre, il y a une betterave braisée pendant trois heures à basse température, puis séchée pendant vingt-quatre heures. Elle arrive en pickles, salée, en poudre et en gel. Et surtout, il y a ce jus fermenté avec des mûres: une délectation. C’est la formule Magdalena: de bons produits, mais pas d’ingrédients de luxe, beaucoup de travail et de réflexion. Le tout est presque toujours végétarien, voire végane. Ainsi le steak de betterave s’est-il imposé comme plat phare dès le troisième jour après l’ouverture. Le chef l’a élaboré pour son propre mariage et le trouve «méga-cool». Dominik Hartmann est notre «Découverte alémanique de l’année».
Le restaurant moderne est inondé de lumière. Et l’on ne s’attend pas forcément à trouver une cuisine aussi avant-gardiste dans la vallée de Schwytz. Pourtant, Dominik Hartmann, sa femme Adriana et son partenaire Marco Appert sont déterminés à attirer les convives de loin avec leur cuisine exploratrice. L’aventure commence dès l’amuse-bouche, qui révèle le parcours du chef, qui a passé chez Andreas Caminada et Fabian Fuchs. Puis les rouleaux de chou-rave aux herbes des prés, mayonnaise au beurre de noix, poudre de persil et crumble de noisettes intriguent. Mais il y a surtout cette essence mystérieuse et intense de chou-rave à l’huile de livèche maison. On gagne en puissance avec le tartare de truite de Sattel (SZ) étuvé à l’oseille. Pomme marinée, céleri, poudre de cendre de poireau, oignon de printemps l’agrémentent avec bonheur.
Le Magdalena n’est pas un restaurant végétarien, même si le premier plat pourrait le laisser croire: des légumes au lait d’avoine. Réticent? En fait, c’est tout simplement fascinant de percevoir l’harmonie des oignons de printemps frits, de la chicorée et des choux frits en crème de potiron que le brocoli cru, le concombre frit et en sorbet viennent encore taquiner. Le plat suivant paraît plus familier: une truite saumonée chauffée doucement avec de la carotte, de l’argousier et un beurre blanc au safran très élégant. La salade et le flan aux asperges et petits pois frais sont moins convaincants, mais les frites et le gel au citron qui les accompagnent sont bons.
Pas de viande du tout, donc? Oh, mais si, il y a cette aiguillette de chez Holzen au Bürgenstock. Elle est cuite sous vide pendant quarante-huit heures, servie avec du topinambour et de l’ail noir. Le chef propose même un «Magdi Burger» avec chou blanc, mayonnaise au miso, sbrinz, jalapeño et concombre mariné.
Le Magdalena se profile en œuvre d’art à part entière. Ainsi le pain au levain est fait maison, la sélection des fromages est strictement régionale, les desserts et les petits fours sont également hors normes, avec notamment le chocolat du voisin Felchlin. Adriana Hartmann dirige le service avec aplomb: cette jeune maman a également travaillé pour Andreas Caminada au Schloss Schauenstein. La seule chose dont vous pouvez vous plaindre est le prix: sept plats très élaborés pour 120 francs… ce n’est clairement pas assez, compte tenu de l’énorme effort fourni! Alors on commence avec 15 points. Mais cela ne s’arrêtera certainement pas là.