Célébrer le Negroni. Existe-t-il un cocktail plus tendance que le Negroni? Il est permis d'en douter. Pour preuve, le breuvage a même droit à sa semaine internationale de festivités, la «Negroni Week», du 22 au 28 septembre. La Suisse n'y échappe pas. Et comment le pourrait-elle, avec une scène de la mixologie aussi riche (en plus d'une bouillonnante communauté italienne, terre d'origine du Negroni)? De fait, ce sont plus de 150 bars, hôtels et restaurants suisses qui mettront à l'honneur la semaine prochaine ce classique parmi les classiques, sous sa forme traditionnelle, ou bien en revisite illuminant une créativité ou des ingrédients particuliers. Une partie des bénéfices des ventes est par ailleurs reversée à Slow Food, mouvement citoyen promouvant le «mieux manger» pour tous.
Merci Monsieur le comte. Si le Negroni est souvent qualifié de classe et de classique, ce n'est pas volé. N'oublions pas que James Bond lui-même en boit un lorsqu'il se lasse de son fameux vodka-martini. Selon la version officielle, l'histoire du Negroni remonterait à 1919, à Florence en Italie. Un comte italien du nom de Camillo Negroni pousse la porte du Casoni Bar, situé rue Tornabuoni. Il commande un Americano (mélange de vermouth, de Campari et d'eau pétillante), mais en version plus corsée. Le barman, Fosco Scarselli, remplace alors l’eau par du gin. Monsieur le comte apprécie, et très vite, les autres clients réclament à leur tour cet Americano revisité, que l’on baptise tout naturellement… Negroni, en référence au comte.
Pas de Negroni sans Campari: le bitter italien rouge rubis fait partie de la liste officielle des ingrédients du cocktail.
Un bitter historique. La belle robe rouge rubis du Negroni lui est conférée par un ingrédient qui lui est indissociable: le Campari, un bitter italien créé en 1860 par le liquoriste Gaspare Campari. Ce dernier, à force d'expérimenter diverses infusions et autres macérations alcooliques de plantes et de fruits, a mis au point la recette de cet apéritif à l'amertume prononcée et à la vive robe rouge rubis. Restée secrète, elle contiendrait une soixantaine d'ingrédients… Dès lors, le Campari était déjà un ingrédient-phare de l'Americano, à la fin du XIXe siècle. Pas étonnant donc que son évolution, le Negroni, ait lui aussi incorporé ce bitter: c'est historique. À tel point qu'il est même dans la liste des ingrédients officiels de l'International Bartender Association. «Seule l'amertume prononcée du Campari équilibre parfaitement la douceur du vermouth, clé d'un Negroni parfait», décrit Veronica Appiani, responsable marketing de Campari Suisse.
Recette
Retour en force. Si le Negroni est toujours aussi populaire, voire davantage, un siècle après son invention, ce n'est là non plus pas un hasard. Plusieurs raisons l'expliquent. Il y a d'abord un appétit certain pour les saveurs amères avec lesquelles les palais des gourmets se sont familiarisés ces dernières décennies. Il suffit de voir les succès des cocktails à dominante amère, tels que l'Aperol Spritz, ou des bières houblonnées, pour s'en convaincre. Le gin vit également une époque faste, y compris en Suisse, avec un nombre de producteurs toujours plus importants. Enfin, un troisième retour en grâce, celui des classiques de la gastronomie et de la mixologie, favorise également les vénérables boissons telles que le Negroni.
Simple et complexe à la fois. Voilà autant de raisons de célébrer ce délicieux cocktail. Pour l'occasion, chaque établissement participant à la Negroni Week en Suisse proposera le cocktail sous sa forme classique, et éventuellement une revisite. «Le Negroni est très apprécié des bartenders, car c'est l'occasion de démontrer leur savoir-faire», assure Veronica Appiani. C'est que, malgré son apparence simple, le Negroni exige précision et doigté. Tout est une question d'équilibre entre les ingrédients, qui doivent en outre être parfaitement dilués, ni trop, ni trop peu. Comme souvent en cuisine, ce sont les recettes les plus simples qui sont les plus difficiles à maîtriser.
Les bartender adorent le Negroni, cocktail qui permet de montrer l'étendue de leur talent.
Tout est dans le poignet: le mélange et la dilution nécessitent un grand savoir faire pour obtenir un Negroni parfaitement équilibré.
Et pourquoi pas en after dinner? Enfin, comment ne pas admettre que le Negroni cartonne parce qu'il est aussi l'incarnation de l'art de vivre à l'italienne? C'est une boisson dont on se délecte en fin d'été, au soleil, à l'heure de l'aperitivo, douce transition entre la journée de travail et le réconfort de ces moments plus personnels qui s'annoncent. «L'amertume du Negroni ouvre l'appétit comme nul autre, c'est le cocktail par excellence à l'heure de l'aperitivo», nous avait glissé Fabien Theisgen, responsable des bars de l'hôtel La Réserve, à Genève. C'est d'ailleurs ainsi que Veronica Appiani préfère le consommer, «même si à l'international, on observe qu'on aime aussi le boire après le repas». À l'apéritif ou en fin de repas, c'est finalement toujours l'heure d'un Negroni.
Où boire un bon Negroni? Nos 10 bars préférés
Photos: Campari Group
