Le Bocca

Claude Frôté et sa brigade affichent une forme olympique. Le Bocca est une institution, certes, mais de celles qui décoiffent juste ce qu’il faut pour surprendre, séduire, faire plaisir à un public volontiers jeune et explorateur.
Le cadre donne le ton, bois brut, œuvres d’art moderne et nappes au tissage structuré. L’accueil est adorable et le chef – joyeux, énergique et tonique – vient volontiers saluer lui-même ses hôtes. Les contenants insolites permettent des mises en scène graphiques et flatteuses et les menus affichent des tarifs tout à fait raisonnables qu’une carte des vins somptueuse vient compléter. Alors on se laisse porter. Par une raviole de radis au saumon coiffée de raifort en mousse et de poivre rose. Le tartare de veau, beau comme un soleil, est dressé au centre d’un réseau de rayons de crème au café dont les notes pâtissières sublimées répondent à une gelée pimentée de noisettes truffée d’éclats de pistache. Superbe! Le filet de rouget est un modèle du genre, croustillant et fondant, souligné d’un curry vert allusif mais plaisant.
C’est alors qu’entre en scène le foie gras de canard poêlé, excellent, titillé par une sauce passion tout en volupté. On se régale aussi des vins maison du Domaine Frôté, comme ce pinot noir 2015 tout en délicatesse et en équilibre. Et c’est avec de magnifiques couteaux Snife que l’on attaque le filet de bœuf, tendrissime, en sauce au single malt qu’on aurait pu imaginer plus intense, entouré de colrave de la région en trois façons. Les magnifiques fromages sont fournis par Sterchi, une référence. Et c’est un bien nommé parfait aux läkerlis et tartare d’ananas, un dessert agréable mais un peu simple, qui ferme la marche. Au café, le financier est tout simplement le meilleur qui soit. Et le chariot des alcools véhicule de véritables trésors, comme cet armagnac de 1900…