Texte: Knut Schwander Photos: Gabriel Monnet
Transmission. «Certaines choses s’arrêtent, d’autres débutent. Et c’est beau de voir que l’histoire se poursuit», constate le célèbre chef Bernard Ravet, philosophe, un verre de Cristal Roederer à la main. C’était hier soir, face au lac, à Vevey, dans un rayon de soleil prometteur. Un jour pas comme les autres pour celui qui a fermé son Ermitage l’année passée: «Ça me rappelle le dernier service à Vufflens, mais, cette fois, c’est un premier service!». En effet, c’était à quelques minutes du repas inaugural de son fils, Guy, dans son nouveau restaurant «Émotions par Guy Ravet». En janvier, nous avions découvert en avant-première son autre restaurant, «Esprit par Guy Ravet», une vraie découverte. Hier, le GaultMillau s’attablait en primeur à la table signature du Président des Grandes Tables de Suisse, parmi seulement douze convives, dont les parents du chef: émotions!
Cadre flatteur. Le restaurant décline les tons sépia et lilas. Il évoque une salle à manger de grande demeure d’autrefois: cheminée de marbre, papier peint paysager, nappages somptueux et grand bouquet de fleurs de printemps. Pour veiller sur ce bel écrin, Alessandro Egidi, venu de l’Hôtel de Ville de Crissier, a l'œil à tout. Et Antoine Lejeune, le sommelier explorateur qui avait déjà conquis son public au Mont-Blanc, à Crans (VS), propose des accords mets-vins tout simplement épatants: «On s’est tout de suite entendus», atteste Guy Ravet, entouré d’une brigade jeune et charmante qui virevolte avec les plats. Et ces plats, justement…?
Produits de grand luxe. Pour faire la différence avec le premier restaurant, juste à côté, Guy Ravet centre son propos sur des produits d’exception: son premier menu est ainsi jalonné de foie gras (à la rhubarbe, en amuse bouche), de boeuf wagyu (en exquise boulette apéritive à l’ail noir, puis en plat principal, en version A5, idéalement saisi sur une plaque de cuisson japonaise) et de caviar Kristal (enfin il garnit un carpaccio de gambero viola juché sur du quinoa un peu dominant). Puis, son menu en huit plats décline aussi des produits locaux. Ainsi ces asperges blanches du Chablais, en apprêt très moderne: elles sont juste brûlées pour gagner cette intensité aromatique qui répond à merveille à l’intense et originale réduction de café Galapagos. Le sandre suisse à la cuisson impeccable se pare d’une croustille de pain au levain et surtout d’une sauce meurette, ode merveilleuse à la grande tradition. Enfin, avec ce brebis du Sapalet, givré (est-ce voulu?), dressé comme un élégant dessert, parfumé au miel de châtaignier et accompagné d’une glace au thym citron: le fromage en version 2.0.
Tradition et modernité. Le petit texte introductif du menu le résume: «Les émotions culinaires pour Guy Ravet? Le rappel du souvenir et l’émotion du goût présent». Mission accomplie. L’historique Grand Hôtel du Lac, membre des Swiss Deluxe Hotels, peut affronter l’avenir en toute sérénité. Grâce à deux véritables coups de coeur, notamment: la raviole de ricotta et citron d’Amalfi confit qui barbote avec un bonheur infini dans un velouté de petits pois: un concentré de saveurs d’une absolue volupté. Et le pré-dessert, au bourgeon de sapin, tout simplement merveilleux.
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