45 minutes chrono. Les derniers jours de l’été permettent encore de savourer un lunch sur la terrasse du Woods. L'ambiance y est zen et reposante, bercés que nous sommes par le son du délicat clapotis des bassins de l'Hotel Intercontinental, au cœur du quartier des Nations à Genève. C'est presque dommage que le Woods' Special, le menu du jour, soit servi en seulement 45 minutes! (Grande photo ci-dessus: le suprême de pintade proposé en plat du jour)
L'entrée de viande séchée, affinée au torchon quatre semaines, et ses accompagnements déclinés autour du maïs.
Une offre locavore. Proposé à 47 francs (entrée, plat), 57 avec le dessert, c'est une offre à l'excellent rapport qualité prix, dont les plats changent au minimum chaque semaine, voire plus fréquemment, en fonction des arrivages. Car le chef Quentin Jacquemoud met un point d'honneur à travailler avec des producteurs locaux et à magnifier le terroir local. Le jour de notre visite, il proposait un épatant duo de suprêmes de pintade de Perly rôtie en croûte d'herbes aromatiques. La volaille est accompagnée d'un caramel de chou-fleur, d’une viennoise de champignons et de deux sauces: un jus corsé et une émulsion à la myrtille d'un violet éclatant. Pour trouver un tel plat du jour, plein de travail et de couleurs, il faut se lever de bonne heure.
Le chef pâtissier Arthur Hoffmann propose des pâtisseries classiques légèrement twistées, avec une juste dose de sucre et de gourmandise.
Passé par le triplement étoilé Clos des Sens à Annecy, Quentin Jacquemoud signe une cuisine de marché simple en apparence, mais où chaque assiette est chargée de travail.
Tarifs raisonnables. Le reste de la carte est plus élaboré, mais toujours dans cette optique de produits locaux bien apprêtés et sachant rester accessibles au niveau tarifaire. Un seul plat dépasse la barrière psychologique des 50 francs. S'agissant des entrées, elles sont autour de 25 francs. Raisonnable, pour un établissement de ce standing.
La truite arc-en-ciel du Juraest servie façon ceviche, avec les œufs du poisson en tarama, quelques billes de riz soufflé et une tuile dentelle pour le croustillant.
Du travail, encore du travail. Proposée en ceviche et dressée en couronne, la truite du Jura apporte une ultime bouffée de fraîcheur estivale. L'œuf de la Ferme du Lignon, lui, se pare de saveurs automnales autour de la pomme de terre, du champignon et d'un espuma d'artichaut. Plat signature du Woods, l’écrevisse du lac s’autorise une escapade voyageuse, astucieusement travaillée à la manière de l’indémodable lobster roll. En épaisses et tendres tranches, le filet mignon séché est parfaitement relevé par la douceur d’un espuma de maïs poivré, qui équilibre à merveille la salinité de cette charcuterie maison, affinée au torchon durant quatre semaines.
Le magnifique sandre laqué du chef Quentin Jacquemoud.
Un sandre d'anthologie. Chaque assiette, élégamment dressée et joliment colorée, conjugue avec audace gourmandise, technicité et un zeste de modernité de ce jeune chef trentenaire. Son autre plat signature, le filet de bœuf Angus suisse, s’accompagne d’un crémeux de cèpes «à la sapinette» - une cuisson infusée à l'épicéa - et d’un siphon de pomme de terre façon cappuccino, au goût de reviens-y. Mais on a sans doute préféré le sandre de la Gruyère. Laqué au soja, il dévoile une chair nacrée à cœur, lovée dans une fine farce à l'oxalis d'un vert uni qui fait penser à un maki. Idéalement rehaussé par une émulsion au beurre blanc, yuzu et ail noir, il s'accompagne de tronçons de poireau brûlé. Quel plat délicat!
Le dessert au café et caramel qui dévoile une ganache café et mousse au chocolat, relevée d'un «poivre des gorilles» de la République du Congo, aux notes fumées.
La tarte tropézienne du moment, aromatisée à la vanille et au pamplemousse.
Le sublime et délicieux cheesecake du chef pâtissier Arthur Hoffmann.
Desserts calibrés. Pour conclure en beauté, c’est sur une longue réglette translucide que sont suggérés les élégants desserts du chef Arthur Hoffmann. Des classiques parfaitement exécutés, à la sucrosité contrôlée et aux jeux de saveurs et textures affriolants.
Evidemmnent, il est parfaitement inutile d'espérer sauter le dessert une fois la réglette présentée.
Au programme: une revisite de la barre Snickers, régressive à souhait, une tropézienne parfumée au pamplemousse et à la vanille, ou encore un excellent cheesecake aérien et fondant surmonté de myrtilles charnues: celui-là, c'était notre coup de cœur. Après s'être quelque peu égaré, le Woods revient plus cohérent et plus intéressant que jamais sur la carte gastronomique de Genève.
Photos: Nouhad Monpays, InterContinental
