«Nous n'avons pas hésité une seconde!» Dans leur p'tite maison (13/20) de St-Pierre-de-Clages (VS), Margaux et Jeremy Chapuis avaient essayé les talkiewalkies pour communiquer entre la salle et la cuisine. «Mais on recevait des communications avec des parapentistes ou des avions qui passaient par là, et on ne s'entendait plus!» Désormais, le jeune couple n'a plus besoin de développer des techniques alambiquées pour se parler durant le service. Car depuis le 8 mai dernier, c'est à Chandolin (VS) qu'il officie, dans l'ancien restaurant de Gilles Varone (15/20), connu pour être minuscule. «La cuisine donne sur la salle, je suis ainsi constamment en contact avec Jeremy, mais aussi avec les clients. Ça fait du bien et cela me permet par exemple de servir moi-même l'un ou l'autre des plats, explique Margaux avec un grand sourire. Lorsque nous sommes venus manger ici la première fois, à l'ouverture de Gilles, nous sommes tombés amoureux de ce lieu, petit, mignon, à l'image de ce que l'on veut offrir à nos clients. Lorsque Gilles a annoncé son départ, les propriétaires de son restaurant sont venus manger à St-Pierre-de-Clages et nous ont proposé de reprendre le restaurant afin d'y proposer notre cuisine. Nous n'avons pas hésité une seconde!»
(Grande photo ci-dessus: Jeremy et Margaux Chapuis, et l'amuse-bouche mariant fraise, courgette et basilic)
Une maîtrise des saveurs impeccable. En salle, Jeremy prend son rôle d'hôte très à cœur, et on apprécie l'ambiance détendue qu'il instaure. Après la décoration sobre et tamisée souhaitée par Gilles Varone, ce sont briques rouges au mur, tableaux rigolos et jolis bouquets de fleurs («cueillis ce matin dans le jardin») qui nous font nous sentir à la maison. Et si le couple souhaite «avant tout s'amuser et faire plaisir à leurs clients, sans chercher une quelconque note ou étoile», le menu en cinq temps est prometteur. Tout en fraîcheur, l'amuse-bouche associe crémeux de courgette au basilic, légère sauce à la fraise et lamelles croquantes de courgette crue. Puis, c'est tomate-mozza au barbecue! Plus précisément, des tomates cerises multicolores émondées et confites sur leur sauce, doublées d'une crème de mozzarella, le tout entourant un palet d'aubergine fondante vêtue d'une sauce barbecue. Une eau de tomate légèrement gélifiée donne un peu de vigueur au tout. Après la fraîcheur vient la rondeur, incarnée par cet omble en croûte de pain déposé sur un gourmandissime beurre blanc au fumet de poisson. À ses côtés, le fenouil se décline en croquante salade aux câpres, tronçon rôti et purée intense en saveur. Une assiette entre acidité et salinité, dont l'équilibre parfaitement trouvé démontre la maîtrise technique de la cheffe, formée à l'Ecole hôtelière de Genève puis passée notamment à La Chaumière de Serge Labrosse et au Neptune du temps de Nicolas Darnauguilhem.
Coup de cœur pour le dessert. Alors que l'on se délecte d'un gamay valaisan sélectionné avec soin par Jeremy, arrive le plat principal: une volaille tendrement cuite et à la peau croustillante, escortée d'une savoureuse ratatouille enlacée dans une lamelle de courgette. La mayonnaise au chorizo envoie sacrément, et le jus de volaille servi à table se déguste à la cuillère... et se sauce avec le pain de la Boulangerie 1955 de St-Pierre-de-Clages, située en face de l'ancien restaurant du couple Chapuis. Embarqués dans un menu enchanteur - tout en restant accessible aux épicuriens d'un soir -, on se réjouit de voir arriver la cheffe avec le dessert: un riz au lait revisité à la cerise et à la noix de macadamia. Cerises compotées et crues, riz au lait en deux textures, noix craquantes, tuiles craquantes, sorbet à la cerise: peu sucré, ce dessert est un vrai coup de cœur! À peine arrivés à Chandolin, Margaux et Jeremy Chapuis ont plaisir à cuisiner pour leurs hôtes, et ça se ressent à table.
Photos: Siméon Calame