«Je crée des univers, et non des plats.» «À la Maison Le Maguet, il n'y a pas d'épices, uniquement des herbes cueillies dans notre jardin ou dans la forêt autour des Evouettes», répond l'espiègle Benjamin Le Maguet lorsqu'on lui demande quelles épices il utilise. Il faut dire que ses plats présentent des mariages de saveurs complexes, à l'instar de ce brochet du Léman, sa vive bouillabaisse du lac, sa pastèque et ses savoureuses tomates, pimpés par quelques feuilles de lierre terrestre et de verveine citronnée. Le chevreuil, à la prodigieuse cuisson, se pare lui de potimarron brûlé, de poire à Botzi, de châtaignes caramélisées et d'un excellent jus presque sirupeux. Noté 14/20 au GaultMillau et primé d'une étoile verte au Michelin, le chef ose: «Je crée des univers, et non des plats.»
(Grande photo ci-dessus: Benjamin Le Maguet et son trio d'amuse-bouches)
Transition entre les générations. Créer un univers, c'est ce qu'a réalisé Olivier, le papa de Benjamin et Jonathan, le sommelier du restaurant. Car c'est lui et son épouse Pierrette qui ont ouvert cet établissement il y a une quarantaine d'années, réjouissant les habitants du Chablais et environs. Artiste dans l'âme, Olivier a créé moult œuvres dans le restaurant: tableaux, fresques, sculptures..., qui donnent à la Maison Le Maguet son charme unique. Mais cette année signera la transition entre les générations, les deux frangins prenant leur envol au restaurant.
Un sommelier passionné. Côté vins, on remercie Jonathan pour ses judicieux choix au verre: l'humagne blanche d'André Roduit, la petite arvine de Guillaume Bodin, le pinot non filtré de Cément Magliocco, le merlot de Mathilde Roux... des artisans de la vigne qui travaillent en adéquation avec la philosophie des Le Maguet. La truite de Chamby en trois variations, par exemple, s'accompagne d'un doux beurre monté au coing, d'un suprême de pruneau confit et de lamelles de mirabelle. Ajoutez un crémeux myrtille, du sérac séché en poudre et des feuilles de basilic citronnier et d'égopode, et vous obtenez un monde culinaire palpitant. Trop complexe? Peut-être, mais reste que les convives en redemandent. Et nous aussi.
Photos: Julie de Tribolet pour L'illustré, Maison Le Maguet