Hôtel Restaurant Valrose
Il y a des associations magiques. Par exemple quand Benoît Carcenat, Meilleur ouvrier de France (MOF) 2015, fait au feu de l’extraordinaire Hôtel de Ville de Crissier, rencontre Mathieu Quetglas, «Sommelier de l’année» 2022. L’un est chef, l’autre directeur du restaurant, et, ensemble, ils font des merveilles dans ce petit boutique-hôtel voisin de la gare de Rougemont. Les clients – souvent jeunes – applaudissent. Tout comme nous: Benoît Carcenat est donc «Cuisinier de l’année» 2023 avec 18 points.
Ici, créativité, pertinence et mise en œuvre confinent au grand art et tutoient les sommets. Et le même émerveillement se reproduit à chaque visite à Rougemont. A l’évidence, Benoît Carcenat affiche une forme olympique. Chaque nouveau plat qui sort de sa cuisine dépasse le précédent: ainsi ces tranches de bonite, un beau thon apprêté entier comme un jambon ibérique. Le service vient le détailler en fines lamelles rouge sombre. On les déguste sur des rouleaux de pastèque confite et rehaussée de piment d’Espelette pour un mariage terre-mer idéal. Puis la courgette répond à la tagète en une bouchée divine, avant que n’entre en scène une huître pochée aux notes fumées que les raisinets viennent titiller.
C’est alors que surgit la tomate carrée: du jamais vu! Un cube parfait – que c’est beau! – qui renferme du caviar et qu’accompagne une tartelette aux crevettes de Normandie. On fond littéralement devant ce luxueux coffret aromatique. Pour l’accompagner, une eau de tomates fermentée au mescal réinvente le bloody mary. Le goût, la technique et la présentation se répondent avec brio.
Le chef mise volontiers sur les découpes et les dressages à la table, confiant au service des carafons pour napper les plats de jus délicieux ou de sauces voluptueuses. Mais voici la betterave, somptueuse, entière avec ses fanes et farcie de fraises des bois en pickles dopées par le raifort: un jeu subtil pour un équilibre parfait. La variation de chanterelles, elle, batifole dans un latte macchiato d’arabica préparé à la table: la réduction de madère et de porto harmonise la douceur, l’amertume et l’acidité en un voluptueux bouquet de saveurs complémentaires. Les amandons d’olives en font une ode à la Méditerranée.
Hommage à la région, le millefeuille ultra-fin de viande séchée de l’Intyamon et de fromage des Forts est devenu incontournable. Et le chef n’hésite pas à réinterpréter la traditionnelle gratinée à l’oignon. A coups de techniques avant-gardistes ou redécouvertes, il assure des équilibres gustatifs rarement égalés.
La sole de ligne aux olives de Kalamata, pistaches, concombre et plancton poursuit sur la même veine tout en délicatesse. Le fumet de poisson rehaussé de dry martini et d’huile à l’aneth atteste d’un savoir-faire exceptionnel en matière de sauces. Les herbes et les fleurs proviennent des cultures maison et des prairies environnantes. Carcenat les instille dans sa cuisine avec une précision chirurgicale, au profit d’une touche de fraîcheur ou d’amertume qui fera la différence. Ainsi le homard bleu – rouge vif en fait! – se pare de pêche de vigne, de sauge et de verjus qui confèrent à la chair du crustacé une délicate note amère. A la douceur de la pêche de vigne répondent des notes fumées à base de bisque de homard, enrichie d’arômes grillés et de corail. Une merveille.
L’Asie souligne en filigrane l’ensemble du menu, mais sans jamais tomber dans les inutiles effets de mode: ainsi le basilic thaïlandais parfume le pigeon de Bresse aux pignons et cassis, ou le shiso, en gel et en pistou, rehausse le filet de veau du Saanenland.
Le même souci de perfection vaut également pour les desserts: d’abord le melon et le fenouil se marient en un jeu de textures admirable, sans excès de sucre. Avec la glace au beurre noisette, la touche de miel et le pollen, c’est un parfait dessert de fin d’été. Enfin, on tombe sous le charme insolite et inattendu de cette burrata de bufflonne à la framboise et à l’estragon: un dessert d’anthologie signé Josselin Jacquet.
Il faut dire que le chef s’est entouré d’une dream team en cuisine comme en salle. Là, son épouse Sabine s’associe aux talents de Mathieu Quetglas (la carte des vins est passée de 600 à 850 références) et de sa compagne Pauline Royer, d’Antoine Tarlier (ex-sommelier de Didier de Courten) et de Giorgio Pariciani, le barman (un ancien de chez Pic), pour offrir un service de haut vol. Et toute la brigade virevolte avec attention et naturel pour raconter chaque plat et en révéler l’aspect unique. Ainsi les apprêts se succèdent, beaux comme des pièces d’orfèvrerie gourmande. L’un après l’autre, ils surprennent, épatent, émerveillent. Voilà qui mérite bien la plus haute distinction que le GaultMillau puisse décerner.


Il y a des associations magiques. Par exemple quand Benoît Carcenat, Meilleur ouvrier de France (MOF) 2015, fait au feu de l’extraordinaire Hôtel de Ville de Crissier, rencontre Mathieu Quetglas, «Sommelier de l’année» 2022. L’un est chef, l’autre directeur du restaurant, et, ensemble, ils font des merveilles dans ce petit boutique-hôtel voisin de la gare de Rougemont. Les clients – souvent jeunes – applaudissent. Tout comme nous: Benoît Carcenat est donc «Cuisinier de l’année» 2023 avec 18 points.
Ici, créativité, pertinence et mise en œuvre confinent au grand art et tutoient les sommets. Et le même émerveillement se reproduit à chaque visite à Rougemont. A l’évidence, Benoît Carcenat affiche une forme olympique. Chaque nouveau plat qui sort de sa cuisine dépasse le précédent: ainsi ces tranches de bonite, un beau thon apprêté entier comme un jambon ibérique. Le service vient le détailler en fines lamelles rouge sombre. On les déguste sur des rouleaux de pastèque confite et rehaussée de piment d’Espelette pour un mariage terre-mer idéal. Puis la courgette répond à la tagète en une bouchée divine, avant que n’entre en scène une huître pochée aux notes fumées que les raisinets viennent titiller.
C’est alors que surgit la tomate carrée: du jamais vu! Un cube parfait – que c’est beau! – qui renferme du caviar et qu’accompagne une tartelette aux crevettes de Normandie. On fond littéralement devant ce luxueux coffret aromatique. Pour l’accompagner, une eau de tomates fermentée au mescal réinvente le bloody mary. Le goût, la technique et la présentation se répondent avec brio.
Le chef mise volontiers sur les découpes et les dressages à la table, confiant au service des carafons pour napper les plats de jus délicieux ou de sauces voluptueuses. Mais voici la betterave, somptueuse, entière avec ses fanes et farcie de fraises des bois en pickles dopées par le raifort: un jeu subtil pour un équilibre parfait. La variation de chanterelles, elle, batifole dans un latte macchiato d’arabica préparé à la table: la réduction de madère et de porto harmonise la douceur, l’amertume et l’acidité en un voluptueux bouquet de saveurs complémentaires. Les amandons d’olives en font une ode à la Méditerranée.
Hommage à la région, le millefeuille ultra-fin de viande séchée de l’Intyamon et de fromage des Forts est devenu incontournable. Et le chef n’hésite pas à réinterpréter la traditionnelle gratinée à l’oignon. A coups de techniques avant-gardistes ou redécouvertes, il assure des équilibres gustatifs rarement égalés.
La sole de ligne aux olives de Kalamata, pistaches, concombre et plancton poursuit sur la même veine tout en délicatesse. Le fumet de poisson rehaussé de dry martini et d’huile à l’aneth atteste d’un savoir-faire exceptionnel en matière de sauces. Les herbes et les fleurs proviennent des cultures maison et des prairies environnantes. Carcenat les instille dans sa cuisine avec une précision chirurgicale, au profit d’une touche de fraîcheur ou d’amertume qui fera la différence. Ainsi le homard bleu – rouge vif en fait! – se pare de pêche de vigne, de sauge et de verjus qui confèrent à la chair du crustacé une délicate note amère. A la douceur de la pêche de vigne répondent des notes fumées à base de bisque de homard, enrichie d’arômes grillés et de corail. Une merveille.
L’Asie souligne en filigrane l’ensemble du menu, mais sans jamais tomber dans les inutiles effets de mode: ainsi le basilic thaïlandais parfume le pigeon de Bresse aux pignons et cassis, ou le shiso, en gel et en pistou, rehausse le filet de veau du Saanenland.
Le même souci de perfection vaut également pour les desserts: d’abord le melon et le fenouil se marient en un jeu de textures admirable, sans excès de sucre. Avec la glace au beurre noisette, la touche de miel et le pollen, c’est un parfait dessert de fin d’été. Enfin, on tombe sous le charme insolite et inattendu de cette burrata de bufflonne à la framboise et à l’estragon: un dessert d’anthologie signé Josselin Jacquet.
Il faut dire que le chef s’est entouré d’une dream team en cuisine comme en salle. Là, son épouse Sabine s’associe aux talents de Mathieu Quetglas (la carte des vins est passée de 600 à 850 références) et de sa compagne Pauline Royer, d’Antoine Tarlier (ex-sommelier de Didier de Courten) et de Giorgio Pariciani, le barman (un ancien de chez Pic), pour offrir un service de haut vol. Et toute la brigade virevolte avec attention et naturel pour raconter chaque plat et en révéler l’aspect unique. Ainsi les apprêts se succèdent, beaux comme des pièces d’orfèvrerie gourmande. L’un après l’autre, ils surprennent, épatent, émerveillent. Voilà qui mérite bien la plus haute distinction que le GaultMillau puisse décerner.