Texte: David Moginier Photos: Antal Thoma/Infolio
Recherches fouillées. C’était un projet de la Confédération : réaliser un recensement de toutes les spécialités culinaires du pays, en racontant leurs origines, leur évolution historique. Une équipe de scientifiques l’avait bouclé fin 2008 dans un site internet fouillé. Un travail précis et documenté, mais moyennement sexy. Le journaliste alémanique Paul Imhof s’en était inspiré – comme de plein d’autres sources – pour en faire un ouvrage plus accessible, publié en cinq tomes en Suisse alémanique. Le voilà réactualisé et traduit en français en un seul volume. Passionnant, complet et gourmand.
Particularités cantonales. La Suisse agricole a produit tant de spécialités diverses, souvent cantonales, parfois dans une seule vallée. Bien sûr, avec le temps, certaines ont franchi les frontières, d’autres ont été créées par une industrie agroalimentaire naissante. Car l’auteur inclut également les Sugus, le Vivi Kola, le Cenovis ou l’Ovomaltine, des gloires nationales qui sont souvent fabriquées aujourd’hui dans d’autres pays. Mais chaque canton a son style pour Paul Imhof. A Fribourg, la religion fait passer la gastronomie du jeûne à la fête, la Bénichon étant son paroxysme, à Genève, la rencontre de l’aristocratie et de la rusticité. «Plus que tout autre canton, Vaud cultive l’art de boire et de manger», affirme Paul Imhof.
Les histoires de l’histoire. Non, le leckerli bâlois n’a pas été inventé pour le très long concile de Bâle de 1431. Non, le Mohrenkopf zurichois n’a pas subi la foudre antiraciste de sa cousine tête au choco. Oui, le sbrinz est le plus ancien fromage d’exportation suisse. Oui, le Sugus a d’abord été connu à Cracovie avant d’occuper les mois d’été de Suchard. La somme se lit avec délectation, en picorant chapitre après chapitre, les 450 histoires que promettent autant de produits.