Texte: Alex Kühn
À quel point la période entre Noël et le Nouvel An est-elle stressante pour vous?
Je ne m’ennuie certainement pas. Dès la semaine précédant Noël, l’activité bat son plein ici à Zermatt et à l’hôtel The Omnia. Beaucoup de clients réclament des classiques comme le filet Wellington ou un poisson en croûte de sel. Pour nous, cela signifie un effort supplémentaire en plus du menu, mais c’est un plaisir. Certains habitués restent jusqu’à trois semaines. Je prends alors le temps d’échanger avec eux pour comprendre comment les surprendre chaque jour. Le petit-déjeuner joue aussi un rôle clé. Comme pour le menu, nous misons sur la créativité et sur un maximum de produits régionaux, du pain au levain du village au yogourt maison préparé avec du lait de foin de Zermatt.
Vous cuisinez non seulement pour les clients, mais aussi pour le personnel de l’Omnia. Est-ce encore possible en haute saison?
Il le faut. Une équipe épanouie est la base de la continuité, et donc de la satisfaction des clients. Pendant les fêtes, les collaborateurs doivent, eux aussi, manger quelque chose de spécial. Par exemple un filet en croûte ou des germknödel préparés par notre nouvelle pâtissière, Anna Saurer. J’attache également beaucoup d’importance à la fête de Noël pour les enfants du personnel. Ils adorent nos beignets de poisson à base d’egli valaisan, mais aussi les pâtes maison ou l’escalope viennoise.
Quels moments de 2025 vous ont particulièrement marqué?
Le retour d’Andreas Petzel, notre junior sous-chef, m’a fait très plaisir. Dès son premier jour, nous sommes partis à la Foire du meuble de Milan, où nous avons monté un restaurant éphémère pour le compte d’Alexander Schärer, patron d’USM et propriétaire de l’Omnia. Les dîners «Four Hands» avec Paul Cabayé et Gilles Varone ont aussi été de très belles expériences.

Pigeon au chou rouge, marrons et argousier. À part, un petit pâté garni de ragoût de pigeon.
Justement, à propos des «Four Hands»: avec qui aimeriez-vous cuisiner l’an prochain?
Sans hésiter, avec Marco Böhler. Il est comme un grand frère pour moi et, avec Tanja Grandits, mon mentor. Je connais pas mal de chasseurs ici en montagne, et Marco a déjà demandé s’il pouvait accompagner l’un d’eux. La chasse est sa deuxième grande passion après la cuisine. J’espère donc réussir à l’attirer en Valais, même s’il est toujours très sollicité.
Y a-t-il un restaurant que vous tenez absolument à visiter en 2026?
Je veux aller chez Gilles Varone, c’est certain. Ce qu’il a servi fin novembre lors du UBS Four Hands Dinner dans son restaurant à Savièse était impressionnant. J’aimerais le vivre cette fois comme client. La Taverne zum Schäfli, à Wigoltingen, figure aussi sur ma liste. Chez Christian Kuchler, j’ai fait mon meilleur repas de 2025. Ses plats sont parfaitement assaisonnés, pleins de puissance. Son approche ludique des grands classiques de la haute cuisine m’impressionne beaucoup.

André Kneubühler (à gauche) et Gilles Varone se sont rencontrés lors de l'UBS Four Hands Dinner à Savièse. La cuisine de Varone a séduit le chef de l’Omnia.
Quels produits cueillis dans la nature occupent actuellement une place dans votre menu?
J’ai un faible pour les épines-vinettes. Elles apportent la touche acide sur les tartelettes de tartare de bouquetin ou de chamois que nous servons en ouverture. L’essence d’arolle, préparée à partir de jeunes cônes d’arbres renversés, apporte, elle aussi, des accents alpins passionnants à plusieurs plats, par exemple dans un dessert à base de chocolat blanc et d’abricots marinés. Il faut être très précis dans le dosage, mais une fois le bon équilibre trouvé, l’arolle devient un ingrédient exceptionnel, tout comme ses aiguilles. Elle fonctionne particulièrement bien avec des éléments riches en matière grasse. C’est d’ailleurs ce qui rend le fromage «Andeerer Arve» de Martin «Floh» Bienerth et Maria Meyer si remarquable.
Restons dans les saveurs alpines. Y aura-t-il aussi une création au génépi en 2026, cette plante si typique du Valais?
J’appelle toujours le génépi «l’herbe au sirop contre la toux», parce que nous en avons fait un sorbet qui rappelle le goût du sirop, en bien meilleur bien sûr (rires). Sous une forme ou une autre, ce produit réapparaîtra certainement.
Où en est le projet de jardin alpin que vous souhaitez aménager sur une pente derrière l’hôtel?
La planification avance bien. Nous avons trouvé un emplacement adéquat à environ cinq minutes à pied de l’Omnia. En raison de la courte saison de végétation en altitude, nous planterons surtout des herbes et des plantes à fleurs comestibles, ainsi que des courges et des pommes de terre de montagne. Nous savons que ce ne sera pas simple. À Zermatt, il fait soit très froid, soit très chaud. Le soleil peut être brûlant, au point qu’il faut arroser les plantes trois fois par jour. Pour tester les conditions, nous avons aménagé un petit jardin dans le village au printemps dernier.
Quels autres objectifs vous êtes-vous fixés pour 2026?
Continuer simplement le chemin parcouru avec mon équipe. J’ai la chance de travailler avec des personnes très talentueuses, passionnées et humaines. Jusqu’ici, nous avons toujours progressé un peu. J’ai récemment regardé des photos de notre tout premier menu, ce qui m’a permis de mesurer le chemin parcouru. Avec l’arrivée d’Anna Saurer à la pâtisserie, nous avons accueilli un nouveau membre dans l’équipe. Elle apporte une énergie formidable et s’intègre parfaitement à notre univers.
André Kneubühler est chef exécutif de l’hôtel The Omnia à Zermatt. Désigné «Découverte de l’année» 2025 par GaultMillau, il est passé de 16 à 17 points dans le guide actuel lors de sa deuxième année à l’Omnia. Son parcours a été fortement marqué par ses sept années passées aux côtés de Tanja Grandits et Marco Böhler au restaurant Stucki, à Bâle.
Photos: Olivia Pulver, Sedrik Nemeth, Roy Matter
