Texte: Siméon Calame

Des champions du monde vaudois. Bain chaud panoramique en dégustant un verre de vin, exfoliation au marc de raisin, enveloppement à la lie, massage à l’huile infusée aux feuilles de vigne rouge… Depuis 2020, au Domaine Bovy, en plein Lavaux (il y en a un autre près de Sion), le spa «La Vigne Swiss Wine Therapy» fait carton plein. Unique en Suisse, l’offre de «La Vigne» a raflé plusieurs prix. Son trio de fondateurs, Céline Broggi, Murielle Nussbaum et Christian Jacot-Descombes, est particulièrement fier d’avoir remporté le «Global Best of Wine Tourism» en 2022. Ce prix est décerné par les Great Wine Capitals (GWC), un réseau international de douze villes (Bordeaux, Cape Town, Porto, Vérone… et Lausanne) associées pour la promotion du vin et de l’œnotourisme. En octobre 2023, le rendez-vous était donné à Lausanne: des dizaines de sommeliers, journalistes et vignerons du monde entier se sont ainsi retrouvés aux portes du Lavaux.

La Vigne Bovy oenotourisme

Le spa de «La Vigne Swiss Wine Therapy», au Domaine Bovy.

Mise en avant internationale. Le Domaine Bovy est un modèle d’œnotourisme: outre le fameux spa en collaboration avec La Vigne, on y retrouve électrobrunchs, dégustations classiques, soirées musicales ou encore location d’appartement avec vue. Pour Eric Bovy, responsable œnotouristique du domaine, le marché local est très combatif, et il est obligatoire de définir de telles propositions, qui sortent de l’ordinaire. «Le prix attribué à La Vigne marque une étape importante dans la reconnaissance œnotouristique internationale du Lavaux», estime Eric Bovy. Les experts des GWC présents à Lausanne l’ont effectivement remarqué: «Leur venue a ouvert des portes extraordinaires et permis de véritablement faire entrer la Suisse dans la cour des grands en matière de vins, estime Constant Jomini, vigneron établi à Chexbres et vice-président de la Communauté de la vigne et des vins de Lavaux. Les vignerons suisses, car toutes les régions ont bluffé les experts présents, sont apparus héroïques aux yeux du monde, et leurs vins vont enfin résonner mondialement. Cela ne fera que renforcer leur réputation.»

Eric et Bertrand Bovy,du domaine Bovy invite une thérapie par le vin avec pour gommage le marc de vin moulin et pour l’enveloppement de la lie de vin et en prenant le bain un verre du chasselas © sedrik Nemeth

Eric et Bertrand Bovy utilisent régulièrement leur terrasse pour des fêtes et des dégustations.

Eric et Bertrand Bovy,du domaine Bovy invite une thérapie par le vin avec pour gommage le marc de vin moulin et pour l’enveloppement de la lie de vin et en prenant le bain un verre du chasselas © sedrik Nemeth

L'enveloppement à la lie, au Domaine Bovy devant un panorama de toute beauté.

Un vignoble unique au monde. «En découvrant le vignoble en terrasses de Lavaux, les experts du réseau des GWC ont été ébahis par la beauté du site, mais surtout très impressionnés par la déclivité et les contraintes de travail auxquelles sont soumis les vignerons, précise Vincent Bailly, directeur de Lavaux Patrimoine Mondial. Leur compréhension instantanée des enjeux et défis d’une telle viticulture, jugée héroïque, nous ont impressionné! Le prix de vente des vins, que nos hôtes ont trouvé particulièrement bas compte tenu des conditions et coûts de production, a également soulevé la question de la rentabilité des domaines. Surtout au regard de la petite taille des entreprises en Lavaux, qui contraste énormément avec les grands domaines argentins, français, australiens…» Constant Jomini a aussi remarqué que «la précision et la qualité des crus était une surprise pour les experts, qui ont notamment été déroutés par le chasselas et ses capacités de garde».

Vincent Bailly

Vincent Bailly, directeur de Lavaux Patrimoine Mondial.

Constant Jomini

Constant Jomini, vigneron établi à Chexbres et vice-président de la Communauté de la vigne et des vins de Lavaux.

Fiertés nationale et personnelle. Si ni Vincent Bailly ni Constant Jomini n’attendaient quelque chose en particulier de cette première rencontre avec les représentants des GWC, tous deux se rejoignent sur l’importance que la vitiviniculture suisse soit mieux reconnue, mieux estimée et mieux valorisée en Suisse et dans le monde. «Pour des domaines souvent familiaux et majoritairement tenus par une ou deux personnes, cette reconnaissance est énorme, assène Constant Jomini. Petit à petit, les vins suisses seront de plus en plus présents sur les grandes tables suisses et à travers le monde, et le mécanisme de bouche à oreille fera son travail.» Mais cela demande du temps. Et Vincent Bailly de compléter: «Cette reconnaissance du travail des vigneronnes et vignerons suisses, vaudois et de Lavaux fait évidemment plaisir, mais il est essentiel, à l’heure où la vitiviniculture souffre, que ce réseau d’experts internationaux s’emploie avant tout à mieux faire comprendre au grand public et aux touristes l’importance centrale qu’occupe cette branche dans la préservation et la valorisation des patrimoines et des savoir-faires qui ont façonnés les exceptionnels paysages viticoles très prisés dans le monde!»

 

Fort potentiel de développement. Une forme développée d’œnotourisme est donc obligatoire pour le directeur de Lavaux Patrimoine Mondial. «L’œnotourisme helvétique a encore un fort potentiel de développement, surtout si on le compare à l’œnotourisme sud-africain ou australien, affirme Céline Broggi, où ce sont des domaines beaucoup plus grands, avec des moyens financiers et humains importants. Les vignerons suisses qui progressent dans cette voie savent, en plus, qu’ils bénéficient de l’attrait touristique général du pays.» La révolution œnotouristique helvétique est en marche.

 

Photos: Maude Rion, Switzerland Tourism - Elena Schmid, Sedrik Nemeth, DR