Encore un ø. On n'arrête plus Mathieu Bruno. Devenu serial-restaurateur, l'ex-chef du Là-Haut à Chardonne (VD) a les mains dans plusieurs casseroles: celles du Beef'Or à Lausanne et Sion, du Maccarò à Marin-Epagnier (NE), et, depuis la semaine dernière, du Victoria (avec le «o» stylisé en «ø», comme pour le Beef'Ør), son nouveau steak house argentin à Lausanne. Mathieu Bruno y endosse un rôle hybride, entre chef exécutif et consultant culinaire. Comprenez: il a signé le concept et la carte, mais n'y cuisine pas.
Chic et bling-bling. Situé au cœur du quartier du Flon, le Victoria a pris ses quartiers au deuxième étage d'une des grandes bâtisses de l'esplanade. Il est sis dans l'ancien Redwood, steak house laissé dans son jus et qui totalisait la note de deux étoiles (TripAdvisor, pas Michelin). Les nouveaux venus ont transpiré pour tout retaper, et ce n'est pas fini. Le rooftop a encore besoin d'un bon coup de balai avant d'ouvrir ses portes, probablement d'ici quelques semaines, nous explique-t-on.
La déco est très… Flon.
Adresse festive. On pénètre dans le restaurant directement par un ascenseur. Nous voici dans une salle XXL avec vue plongeante sur l'esplanade en contrebas. La décoration allie plafonds noirs, bois foncés et fauteuils d'un vert profond qui donnent une atmosphère générale assez sombre. Flon oblige, c'est à la fois chic et bling-bling. C'est sans doute adéquat pour une ambiance fête et paillettes le samedi soir. Pas sûr néanmoins que tous les clients apprécient de dîner sous cette statue aux ailes d'or et tétons qui pointent. Le Flon, c'est bien sûr l'épicentre de la vie nocturne de la capitale vaudoise, du moins pour ceux qui aiment les bars et les clubs. Le Victoria ne devrait pas changer le visage du quartier. «On a trouvé l'endroit très cool, il correspondait à notre projet d'avoir un restaurant festif où commencer la fête avant de sortir», explique Mathieu Bruno, qui prévoit d'organiser des soirées musicales avec chanteurs et autres DJs les soirs de fin de semaine.
À partager à l'apéritif, ces croquetas de tapioca et purée de chorizo sont le snack parfait pour entamer la soirée.
Sans atteindre la finesse (ou le prix) des viandes de Beef'Or, le rib eye du Victoria développe de belles notes de charbon fumé. En accompagnement, une purée de pommes de terre et une carotte, confite mais pas pelée.
Ceviche et tartare de cuadril (rumsteak) sauce chimichurri, mousse pimentée: de belles entrées fraîches et relevées pour réveiller les palais.
Viande argentine. Dans les assiettes, le Victoria propose une cuisine inspirée d'Argentine, avec une large place dédiée aux viandes: pièces grillées sur braise façon asado, tartares, ou encore en cuisson lente. Le choix n'est ni aussi pléthorique, ni aussi pointu qu'au Beef'Or: le bœuf est ainsi décliné en gamme normale, ou en angus. Le chef s'approvisionne ici aussi auprès de son associé Iris Saliu, manager d'Affinitis, société qui sélectionne et importe des viandes en Suisse. «C'est un choix moins exclusif qu'au Beef'Or, mais la qualité de la viande argentine est indiscutable, et les prix sont plus doux», précise le chef. Comptez une quarantaine de francs pour 200 grammes de rib eye, accompagnements inclus: de quoi garder un peu d'argent pour sortir ensuite.
Assiettes colorées. Le côté festif se retrouve également dans les entrées. Fraîches, colorées, gourmandes, ce sont de belles assiettes appétissantes à partager facilement. Servi avec de gros grains de maïs grillés de type choclo, le ceviche de poisson blanc était réjouissant, même si son leche de tigre était un peu trop rare dans l'assiette. Du côté des entrées chaudes, de bonnes petites croquetas au chorizo, fromage et tapioca constituaient un accompagnement parfait pour l'apéritif. Avec cette formule, Mathieu Bruno semble avoir joué la sécurité: le Victoria trouvera certainement sa clientèle dans ce quartier animé. Tant mieux pour le chef hyper actif, qui a de toute façon fort à faire ailleurs: il doit prochainement inaugurer un second Maccarò à Sion, et il voudrait un autre Beef'Or à Genève.
Le restaurant Victoria à Lausanne
Photos: Victoria, Fabien Goubet
