Texte: Knut Schwander Photo: Nicolas Righetti

Nicolas Righetti

Apprécié, honoré, reconnu au Beau-Rivage Palace, vous avez décidé de quitter Lausanne. Pourquoi?

C’est un concours de circonstances qui a entraîné ma décision. Il y a l’aspect familial: Marie, ma compagne, m’a toujours soutenu et suivi pendant huit ans en Allemagne, puis en Suisse. Mais j’ai pris conscience de l’importance du cocon familial, de la nécessité de retrouver notre famille en France pour la scolarité de nos enfants, notamment. Puis il y a eu l’annonce du départ du chef sommelier de la maison Pic à Valence. Une chance pour moi de rejoindre le vaisseau amiral: une fonction rare dans un établissement triplement étoilé, avec la possibilité de dialogue avec la cheffe, Anne-Sophie Pic, le plus fin palais que je connaisse.

 

A Valence, quels sont vos projets?

Comme lorsque je suis arrivé à Lausanne, j’ai quelques appréhensions. Est-ce que je serai au niveau? Car nous serons une équipe de neuf sommeliers avec une multitude de projets. En plus du restaurant, il y a le bistrot où nous allons donner une dimension plus importante au vin, l’organisation d’événements autour du vin, la boutique que nous comptons orienter encore plus vers le vin…

 

2020, l’année de votre consécration en Suisse est aussi celle du covid. Comment l’avez-vous vécue?

Au Beau-Rivage Palace, nous sommes restés ouverts – même maintenant – pour les clients de l’hôtel. Et nous avons vécu un été fantastique. Mais, pour la restauration, 2020 restera une année compliquée. Pour moi, elle restera cependant l’année de ma vie en sommellerie, la plus forte en émotions de toute ma carrière professionnelle. J’en garde une fierté immense.

 

Votre titre de «Sommelier de l’année» a-t-il modifié votre approche du métier?

Ce titre s’est accompagné d’un élan incroyable dans ma carrière. Je me suis trouvé happé dans une spirale médiatique très flatteuse, qui génère cependant des attentes auxquelles il faut répondre: cela m’a permis d’évoluer, car au début j’avais l’impression que dorénavant il m’était interdit de ne pas savoir. Puis j’ai réalisé que ce n’était pas le cas, mais qu’il fallait trouver les mots justes pour l’expliquer.

 

Le virus, qui plombe le monde de l’hôtellerie et de la viticulture, vous a-t-il freiné dans votre élan?

Malgré le covid, j’ai démultiplié les contacts avec les vignerons. Il m’a paru essentiel de ne pas céder à l’inertie et aux lamentations inutiles. J’ai également été démarché par beaucoup de vignerons: être ainsi sollicité m’a paru une invitation à ouvrir mon cœur à de nouveaux horizons que je n’aurais peut-être pas découverts en temps normal.

 

Quel souvenir garderez-vous de votre passage en Suisse?

J’éprouve un attachement fort à Lausanne et au Beau-Rivage Palace, pour la beauté du site et pour la qualité du service. Si Munich et Paris ont été des tremplins, les cinq ans passés en Suisse représentent la moitié de ma vie de sommelier. Ce temps m’a donné une conscience supplémentaire de mon métier. J’ai aussi approfondi ma connaissance des vins suisses que j’ai bien l’intention de valoriser en France.