Surprise au bout de la rue. «Chez moi, le bon chocolat provoque un réflexe de Pavlov», lance Knut Schwander, responsable du guide GaultMillau en Suisse romande. Lorsqu’après quinze jours de voyage, il est récemment arrivé à Cheng Du (la capitale du Sichuan en Chine), son regard ne pouvait donc pas manquer l’enseigne «Blondel-Lausanne». Tel le loup de Tex Avery, il a foncé. Prix des 100 grammes de pralinés: environ 30 francs suisses. Pas grave, quand on aime, on ne compte pas: «J’ai adoré retrouver le goût des chocolats de la rue de Bourg, confesse-t-il. Adolescent, c’est déjà dans le chocolat que je dépensais mon argent de poche. Aujourd'hui, je continue à y acheter les irrésistibles truffes au caramel et les rosolios, ces cerises amarena entourées de chocolat et d’amandes effilées.» Sur Facebook, sa photo a eu un certain succès, avec notamment un commentaire: «Blondel a été revendu à des Chinois, sauf erreur». De retour en Suisse, il a voulu en avoir le cœur net. En fait, s’il y a bel et bien deux points de vente en Chine, à Cheng Du et à Shanghai, Blondel n’est pas du tout sous pavillon chinois!
Tradition, classicisme et gourmandise: le trio secret de la réussite de la chocolaterie Blondel.
Tout a commencé vers 1850. C’est à la place St-François, à Lausanne, qu’Adrien et Louise Blondel ont établi leur premier commerce de chocolat. Succès oblige, en 1891, ils déménagent à la rue de Bourg. Depuis, la belle devanture du précieux magasin est restée intacte. L’enseigne a pourtant changé de main. Une première fois en 1953, puis en 2001, lorsqu’elle est rachetée par le boulanger Alfred Polli. Depuis, elle est restée dans la même famille. C’est à présent Bastien Polli, son petit-fils, qui est à la tête de l’entreprise. Nous sommes donc allés lui demander quel était ce projet asiatique.
Bastien Polli, petit-fils de Luc, aujourd'hui à la tête de Blondel.
La Rue de Bourg, à Lausanne, il y a quelques décennies.
Le chocolat de l’ambassade suisse. L’aventure a démarré en début 2012 à Tokyo, au Japon, dans le prestigieux centre commercial Takashimaya. C’est là que l’entrepreneur chinois Red Zambing, dont la famille vit à Lausanne, a choisi d’ouvrir un premier magasin Blondel en accord avec l’enseigne. Avec ces chocolats importés directement depuis la capitale vaudoise, il devient fournisseur de l’ambassade suisse. «Il nous est arrivé d’expédier quatre tonnes de chocolats à Tokyo pour la Saint-Valentin», se souvient Bastien Thiebaut, qui est depuis plus de vingt ans le maître chocolatier de la maison. Après la boutique de la capitale japonaise, qui a fermé en 2013, l’enseigne ouvre à Shanghai en 2016. Un premier magasin, puis deux autres, et enfin celui de Cheng Du.
Truffes, plaques, bonbons: la sélection de Blondel fait saliver.
Choco treck de Lausanne à Shanghai. Si le covid a entrainé la fermeture de deux des trois boutiques de Shanghai, ce sont quand même près de trois tonnes de chocolats fabriqués rue de Bourg qui s’envolent chaque année pour la Chine. On n’y trouve évidemment pas les cent cinquante produits de l’assortiment confectionné par Bastien Thiebaut, Yves Gaudet et leurs deux aides. Mais le goût y est. Si vous n’avez pas l’occasion de vous rendre en Asie, il est quoiqu'il en soit plus simple de découvrir la spécificité de la signature Blondel à Lausanne! Par exemple, en participant au Chocotreck: le 12 septembre, dix chocolatiers lausannois proposeront pour la cinquième année consécutive une balade gourmande à travers la ville, de chocolatier en chocolatier. Cette année, les participants découvriront dix créations sur le thème de l’IA (pour «intelligence artisanale») et les 1300 passes seront mis en vente le 8 septembre. Autrement, on peut simplement se rendre à la rue de Bourg 5… à moins de passer par Shanghai ou Cheng Du.
La chocolaterie Blondel à Lausanne (et en Chine)
Photos: Knut Schwander, Chocolaterie Blondel