Photos: goodbilly.ch (titre), Siméon Calame
Terrasse enchanteresse. Au bord de la route cantonale? Oui, mais une fois les escaliers arborés montés, la jolie bâtisse du restaurant Le Maguet, aux airs de mas provençal, s’offre à nous comme une heureuse parenthèse. Petite piscine, peinture bleu azur, tonnelle, statues… nous sommes ailleurs. Cette maison, c’est une histoire de famille: Olivier et Pierrette Le Maguet l’ont tenue dès 1984, avant que leurs enfants Benjamin et Jonathan, chef et sommelier, ne reprennent le flambeau en ce début d’année. Pas besoin de se parler: les deux frères se comprennent et déroulent leur service parfaitement, accompagnés de leur mère Pierrette et leur tante Véronique.
Benjamin Le Maguet propose deux menus: poissons du lac et viandes du coin.
Les plats changent chaque jour, selon les livraisons et les humeurs du chef.
Un oeuf crémeux et délicat.
Cuisine décomplexée. La carte des vins est entièrement tournée vers le Valais: Christophe Abbet, Ilona Thétaz, Marie-Thérèse Chappaz… Puis, c’est Benjamin et son nouvel acolyte Damien Delacoste (ancien chef de l’Ermitage, à Clarens) qui entrent en scène. Le premier, formé chez Mathieu Bruno et arrivé troisième au dernier Bocuse d’Or Suisse, assume «une cuisine qui ne plaît pas à tout le monde, qui sort du cadre». En effet, l’homme au regard malicieux tourne ses plats vers les plantes sauvages, les saveurs de la nature encore peu connues, et une cuisine modernement durable. «Voir le monde dans lequel mes deux enfants (4 et 6 ans) grandissent me fait peur. Si je peux aider à aller dans le bon sens, ce sera gagné pour moi», explique le fan de René Redzepi (le chef du Noma à Copenhague, triplement étoilé et cinq fois meilleur restaurant du monde selon le classement World’s 50 Best, qui adopte depuis longtemps une cuisine brute et tournée vers la nature).
Cochon Grand Cru, polenta, abricot.
Poulet pattes noires, déclinaison de courgette et siphon de pomme de terre.
Un chariot de desserts... fabuleux!
Premier acte, l'œuf crémeux surmonté de chou-fleur en poudre dans une texture inconnue mais ô combien agréable. Dessous, le cercle lacté gélifié et la mousse de rutabaga, mariés à quelques morceaux de fraise fraîche, sont excellents. Compliqué? Peut-être, mais c’est bon. En second acte, le cochon «Grand Cru» (si, si!) se retrouve escorté de deux tronçons de polenta rustique, de points de gel à l’abricot bien acide, et d’un doux müesli croquant au sésame. Durant l'entracte, on n’hésite pas à croquer dans le pain aux figues du jardin, tartiné de beurre d’alpage, avant de fondre pour le troisième acte, le poulet pattes noires de la Gruyère. Moelleux comme il faut, coiffé de poudres d’olive noire et d’oignon, il s’associe à un siphon de pomme de terre agria et à une déclinaison de courgette (lacto-fermentée, cuite au sel et en pickles). La sauce est à se damner, les feuilles de tagète des murs goûtent le fruit de la passion, et les morceaux de crème prise au rutabaga amène une chouette texture.
Grand potentiel. La scène finale démarre à l’arrivée du chariot de gâteaux, symbole de la maison. Entièrement réalisés par Pierrette, les seize (!) desserts font tous plus envie les uns que les autres. La tarte aux framboises est délicieusement acidulée, la Tatin diaboliquement gourmande, les profiteroles régressives, et la mousse au chocolat - sans produit laitier- éclatante. Avec le café, on arrive encore à croquer dans trois chocolats de Michaël Randin, chocolatier 100% bio du Nord vaudois. Aux Evouettes, le fil rouge est clair, le chef est sûr de lui et la cuisine suit: Benjamin Le Maguet est très bien lancé dans son aventure gastronomique.
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Restaurant Le Maguet
Route Cantonale 95
1897 Les Evouettes
024 481 26 04
Horaires:
Mardi - samedi: 11h - 15h et 18h30 - 23h