La Bavaria

Le fond de l’assiette en taches coloristes vertes et jaunes se laisse recouvrir d’épaisseur et de liquide. La soupe froide tomate-basilic de Geoffrey Romeas plaît par sa fraîcheur, grâce à de belles longueurs acides préservées et au croquant de l’échalote. En fond sonore, on entend les habitués de la vénérable brasserie La Bavaria redessiner le quotidien des visages de Lausanne.
En cuisine, ça chante gaiement «à l’abordage» et, au service, on aborde chaque étape avec le sourire. Le tartare de thon rouge finement ciselé se laisse napper de l’éclat de petites groseilles et d’un coulis sans artifice. Le toast de pain au levain ponctue la bouchée croquante. On ne retrouve pas la puissance du gingembre, des baies roses et du citron vert promis dans l’intitulé du plat. Mais le contraste entre le poisson cru et la groseille fonctionne. En plat, le homard à la plancha séduit par sa cuisson ardente et sa franche découpe. Sa présentation éclatée au milieu de légumes fait plaisir. Mais les légumes manquent de saveurs. On regrette le non-choix: des bouts de patates, des pointes d’asperges, des carottes. Seules les févettes rappelant des arômes de Catalogne frappent. On les rêve avec un homard, accompagnées d’une crème plus audacieuse.
Les raviolis aux champignons et aux chanterelles arrivent sous une épaisse émulsion recouverte de pistaches vertes juste torréfiées. Jolie texture en bouche, des pâtes très bien exécutées. Bouillant, le plat étincelle, puis cela se tasse au fil de la dégustation et devient monolithique. Et surtout on se demande où se trouvent les champignons promis, étouffés dans une farce de ricotta omniprésente. On apprécie les desserts pas trop sucrés et aux textures maîtrisées. Mais la pavlova est un peu saturée par la glace vanille, tandis que la forêt-noire revisitée est bien fondante. Au final, un repas bien équilibré, par moments délicat, dans une ambiance conviviale, mais le tout manque d’un grain de folie.