Hôtel Alpes et Lac

Un jour, un écrivain russe en visite à Neuchâtel réclama un hôtel face au lac et à deux pas de la gare. On repense à cette anecdote sur la somptueuse terrasse avant même de passer commande. Comme chez l’écrivain russe, une nostalgie de la grandeur d’antan pourrait s’éveiller face au panorama. La cuisine, elle, s’ancre dans la simplicité et se souvient de la proximité du lac. Sur la carte apparaît le nom du nouveau chef, Daniel Ventinhas, tout juste arrivé en juillet du Restaurant-Auberge de la Tène, au bord du même lac. Son nom figure sur la carte, comme les prénoms de trois autres cuisiniers. Bel esprit d’équipe.
Au service se succèdent directeur d’hôtel, homme d’expérience, et apprenti; tous se démènent avec humour et élégance pour faciliter la narration. Cela commence par une mâche franche de tartare de brochet à la découpe impeccable, dommage que sa chair soit masquée par un excès de sel. Le bout de baguette fané huilé sans âme empêche de se concentrer sur le seul goût du poisson. Par contre, voilà un sans-faute pour la terrine maison accompagnée de pickles de rhubarbe et de quelques feuilles de salade enveloppées dans une courgette jaune juste froissée à la mandoline. Du terroir ensauvagé et de la fraîcheur. En plat, là aussi, la viande séduit plus que le poisson. Les morceaux de bondelle souffrent d’une cuisson trop définitive, les tomates séchées relèvent de l’anecdote et le riz déçoit franchement. Alors que les noix de ris de veau offrent un moment de délice, leur cuisson souple, presque rosée, permettant au produit de s’épanouir, avec juste une petite crème délicate. Au centre de l’assiette, un dôme de pâte et d’épinards frais. Simple comme bonjour, mais si bon.
Au rayon des desserts, on apprécie l’originalité de la glace cardamome et la qualité des muffins, mais trop de sucre tue le caramel au beurre salé. On nous laisse jouir encore longtemps de la terrasse d’exception avec la douceur complexe d’un Flétri de la Maison Carrée.